
J’ai rencontré Mathieu Lemonnier en début d’année, lors du pré-événement CEGID du Sommet de l'innovation Tech RH. Mathieu nous a présenté KMB Labs en réalisant une démonstration en direct : il s’est glissé dans la peau d’un candidat, tentant de postuler à une offre via le site carrière d’une entreprise.
En quelques clics, les limites du parcours candidat traditionnel sont apparues clairement : manque d’intuitivité, lenteurs, complexité. Cette mise en situation pose les bases d’une réflexion partagée sur l’expérience candidat, et sur ce qu’elle pourrait devenir.
Pour prolonger cet échange, j’ai posé quelques questions à Mathieu sur la genèse de KMB Labs, son fonctionnement, et sa vision du recrutement de demain.
Pour commencer, peux-tu nous raconter comment est né le projet KMB Labs ? Quel était le besoin initial ou l'intuition qui vous a mis en mouvement ?
Le projet KMB Labs est né en 2017, à l'époque où je dirigeais l'agence social media The Social Republic. Lors d'une conférence organisée par Facebook, une annonce a particulièrement retenu notre attention : la possibilité d'intégrer des algorithmes dans les plateformes de messagerie, notamment Messenger.
Kévin Colleaux, alors responsable du développement chez nous, est venu nous voir, mon associé Alban et moi, convaincu que cette évolution technologique allait profondément transformer la manière dont les marques interagissent avec leurs audiences.
Nous avons rapidement compris que ces nouveaux agents conversationnels pourraient automatiser une partie des tâches récurrentes, notamment la modération des messages sur les réseaux sociaux, jusqu'alors très chronophage pour nos équipes.
C'est à partir de cette intuition qu'est née l'aventure Kick My Bot, devenue KMB Labs, puis Cegid Agent Conversationnel à la suite de notre rachat par Cegid en juin 2024. Une aventure entrepreneuriale née d'un croisement entre innovation technologique et besoin opérationnel très concret.
Concrètement, comment fonctionne votre solution ? À quoi ressemble l'expérience côté recruteur, et côté candidat ?
Notre solution place le candidat au centre de l'expérience. Concrètement, nous venons greffer une interface conversationnelle dopée à l'IA directement sur le site carrière de nos clients. Cette surcouche intelligente est connectée à leur ATS, ce qui permet d'automatiser et de fluidifier l'ensemble du parcours candidat, de la découverte du poste jusqu'à la candidature.
Côté candidat, l'expérience est simple, rapide et personnalisée : il peut poser ses questions, découvrir les opportunités, et postuler en quelques minutes, 24/7, comme s'il discutait avec un recruteur en direct.
Côté recruteur, c'est un vrai levier de performance. Nos clients constatent une nette augmentation de leur taux de transformation sur leur site carrière, tout en modernisant leur image employeur et en gagnant un temps précieux sur le tri des candidatures.
KMB Labs semble couvrir plusieurs volets du parcours candidat, de la prise de contact à l'onboarding. Peux-tu nous donner un aperçu des différentes possibilités qu'offre votre outil ?
Notre solution intervient dès les premiers instants du parcours candidat, pour offrir une expérience à la fois fluide, engageante et efficace.
Tout commence lorsque le candidat arrive sur le site carrière de l'entreprise. Notre agent conversationnel l'accueille, l'oriente en fonction de son profil ou de ses attentes, et répond en temps réel à toutes ses questions, qu'elles soient liées au poste, à l'entreprise ou aux conditions de travail.
Une fois engagé, le candidat est accompagné dans son processus de candidature, de manière simplifiée, intuitive et sans friction. Nous allons même jusqu'à préqualifier son profil grâce à des échanges dynamiques, ce qui permet de mieux cerner sa compatibilité avec le poste.
Enfin, si le profil est pertinent, notre agent peut directement proposer un créneau pour un premier entretien, en lien avec les disponibilités des recruteurs. C'est un véritable facilitateur, aussi bien pour les candidats que pour les équipes RH.
Parlons un peu modèle économique : comment fonctionne votre tarification ?
Depuis notre intégration au sein de Cegid en juin dernier, notre modèle économique a évolué pour s'aligner avec les practices du marché.
Aujourd'hui, nous proposons deux modes de tarification, en fonction de la typologie de l'entreprise. La facturation se base généralement sur le volume de candidatures reçues chaque année ou sur le nombre de collaborateurs.
Dans les deux cas, nous fonctionnons en mode SaaS, avec des abonnements annuels ou pluriannuels, afin d'accompagner durablement nos clients dans l'amélioration de leur parcours candidat.
Peut-on utiliser KMB Labs avec d'autres ATS que celui de Cegid ?
Absolument ! KMB Labs est une solution ouverte et agnostique. Même après notre rachat par Cegid, une grande partie de notre chiffre d'affaires est encore réalisée auprès de clients qui utilisent d'autres ATS.
C'est d'ailleurs l'une de nos grandes forces : notre technologie s'adapte facilement à l'écosystème de chaque entreprise, quels que soient les outils déjà en place. Nous privilégions toujours l'intégration fluide et l'expérience utilisateur, sans imposer de changement d'infrastructure.
Vous avez développé un tableau de bord pour mesurer l'impact des pages carrières. Peux-tu nous en dire plus ?
Quels types de données les recruteurs peuvent-ils suivre ?
Nous avons repensé la manière d'analyser la performance d'un site carrière, en y injectant une dimension conversationnelle unique grâce à notre technologie.
Concrètement, au-delà des données classiques — trafic, taux de clic, taux de conversion, provenance des candidatures — nous capturons et analysons toutes les interactions entre les candidats et notre agent conversationnel.
Ce qui est fascinant, c'est que dès qu'on donne la possibilité de dialoguer, les candidats s'expriment beaucoup. Ces échanges nous permettent d'extraire des insights précieux, regroupés par thématiques : questions récurrentes sur les salaires, les conditions de travail, l'ambiance, les parcours de carrière...
Ces données qualitatives, croisées avec les indicateurs quantitatifs, offrent aux recruteurs une vision beaucoup plus fine et actionnable des attentes et des freins des candidats. C'est un véritable outil d'aide à la décision pour optimiser à la fois la stratégie de marque employeur et l'efficacité du site carrière.

Parmi toutes ces données récoltées, lesquelles t'ont le plus surpris ou ont eu le plus d'impact chez vos clients ?
As-tu un ou deux exemples concrets à partager ?
Ce qui surprend le plus nos clients, c'est le rôle que notre solution joue dans la prise de décision... du côté des candidats. En dialoguant avec notre agent conversationnel, ces derniers peuvent très rapidement se faire une idée concrète de l'entreprise, de sa culture, de ses attentes — et décider en toute autonomie si le poste leur correspond.
Résultat : ce dialogue en amont permet un premier tri naturel et qualitatif, qui allège considérablement le travail des recruteurs et améliore la pertinence des candidatures reçues.
Un autre impact fort que nous mesurons, c'est l'augmentation significative du taux de transformation : en rendant le parcours de candidature plus fluide, plus interactif et plus intuitif, on réduit les abandons et on booste le volume de candidatures finalisées.
Chez plusieurs de nos clients, cette amélioration s'est traduite par une hausse de 20 à 30 % des candidatures qualifiées, sans changer une ligne dans les annonces — uniquement en fluidifiant l'expérience.

Comment vois-tu évoluer le recrutement dans les prochaines années ? Quelles nouvelles possibilités technologiques ou usages pourraient, selon toi, transformer nos pratiques ?
Le recrutement a déjà beaucoup évolué ces dernières années, avec une montée en puissance des outils d'automatisation, de sourcing intelligent, ou encore d'analyse de données. Et cette tendance va clairement s'accélérer : les recruteurs seront de plus en plus équipés pour gérer le volume, gagner en efficacité, et affiner leurs décisions.
Mais ce qui m'intéresse particulièrement, c'est ce qui se passe côté candidat. Aujourd'hui encore, une fois la candidature envoyée, c'est souvent le grand flou : pas de retour, pas de visibilité, pas de perspective. Le processus reste très "boîte noire", ce qui est frustrant et démotivant pour beaucoup de talents.
Je suis convaincu que dans les années à venir, de nouveaux outils vont émerger pour rééquilibrer cette relation, et pousser les entreprises à offrir une expérience plus transparente et plus respectueuse du candidat. Il y aura, j'espère, une forme de pression sociale & concurrentielle– pour améliorer ce qui se passe après la candidature.
Et en parallèle, je pense qu'on va aussi assister à une forme de professionnalisation côté candidat : plus de préparation, plus d'outils à disposition, plus d'attentes, et une exigence plus forte vis-à-vis des employeurs
Merci Mathieu !
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