La question est d'actualité ! Ressources Humaines et Innovation font-ils bon ménage ? Bien avant que le sujet soit en vogue, Philippe Mast et Julie Mackay, co-fondateurs de CORTO. REV se posaient la question et prônaient déjà la créativité. C'est une des raisons pour laquelle il sont décidé de sonder les principales intéressés à travers un grand sondage sur le sujet.
Julie, pouvez-vous nous présenter CORTO. REV ? Et l'origine de son nom ?
L’origine du nom CORTO.REV vient de la bande dessinée Corto Maltese. Héros malgré lui, rêveur, globe-trotteur, témoin de l’histoire et de ses soubresauts, Corto Maltese a toujours fasciné Philippe ; et lorsqu’en 2003 nous avons cherché un nom pour la compagnie, Corto est venu assez rapidement sur la table. On a essayé pendant un temps de justifier notre choix avec un acronyme tel que Conseil en Organisation, etc.… pour en venir très rapidement à la conclusion de Corto Maltese nous ressemblait et que nous l’assumions pleinement. Puis est venu s’ajouter le « REV », pour Réseau d’Experts Virtuels, ce qui était un moyen de clarifier notre modèle d’affaires. Nous ne voulions pas gérer d’employés mais développer un écosystème d’experts autour de CORTO, tous avec une double expérience en conseil et en entreprise. Grâce à ce réseau nous avons pu dépasser nos propres limites cognitives en puisant dans la mine de connaissances de tous nos acolytes.
Comment vous différenciez-vous aujourd’hui ?
Nous nous distinguons surtout par nos valeurs. Tout d’abord l’Innovation. Nous avons toujours souhaité explorer de nouveaux dossiers, c’est une passion ancrée dans l’ADN de CORTO.REV. Aujourd’hui, nous avons une ressource dédiée à la recherche de nouvelles pratiques et dont l’objectif principal est de nous nourrir pour rester en avant de la parade.En deuxième, la transparence. On ne sait pas tout, mais nous sommes capables d’apprendre. On demande à nos clients d’être des partenaires d’affaires, de nous challenger, de nous faire confiance et en retour ils attendent la même chose de nous. On veut se sentir à l’aise de pouvoir dire le fond de notre pensée et en même temps de recevoir un feed-back régulier afin de réussi dans nos mandats. En troisième, la réflexion stratégique. Réaliser nos mandats exige un haut niveau d’énergie, la coordination de nombreuses activités, mais nous n’oublions jamais de prendre le temps de prendre du recul et de réfléchir, d’explorer de nouvelles avenues et de nous ajuster au besoin.
La deuxième chose qui nous distingue est notre modèle d’affaire que nous avons bâti en fonction de nos intérêts et passions. Nous sommes des Head-hunter car nous aimons trouver les meilleures ressources, interagir avec elles, comprendre leur mode de fonctionnement et réussir un bon match avec nos clients. Nous sommes aussi des consultants en développement organisationnel, avec un intérêt marqué pour la gestion de la relève, le développement du Leadership et les changements de culture organisationnelle.
Vous avez commencé à réaliser des enquêtes sur la créativité et l’innovation. Qu’est-ce qui vous motive à le faire ?
Nous avons commencé à faire des études sur la créativité et l’innovation en 2013. C’était l’aboutissement d’une réflexion qui avait débuté en 2008 au moment de la crise financière. Après avoir étudié de près le choc que cela a représenté pour les entreprises (Philippe avait aussi comme expérience celle de 2001 alors qu’il travaillait dans une entreprise de Télécom), nous sommes vite arrivés à la conclusion que d’une part il n’y aurait pas de retour à la « normale » et que d’autre part les entreprises les plus innovantes étaient celles qui tiraient le mieux leur épingle du jeu. En 2010 nous avons commencé à donner des conférences sur le thème du « Leadership d’innovation », puis en 2012 nous avons développé nos outils pour intervenir directement en entreprise et les aider à réfléchir aux leviers de changements culturels qui favorisaient l’éclosion d’une culture d’innovation. Un des outils était un questionnaire exhaustif qui permettait de souder les trois piliers de l’innovation : les Individus, les Valeurs et l’Écosystème interne. Puis nous avons voulu valider notre questionnaire à grande échelle, auprès d’une population que nous connaissons bien : les gens de RH. Nous avons fait une première étude en 2014 auprès des gestionnaires de la fonction RH, et nous préparons celle de 2015 qui interrogera non seulement les gestionnaires mais aussi les jeunes professionnels (Génération Y) afin de voir si nous constatons des différences dans leur perception du degré d’innovation de la fonction RH au Québec. 2015 sera aussi l’année où nous élargirons notre scope en lançant la première étude sur la fonction Marketing.
Les premiers résultats de votre enquête sur la créativité et l’innovation RH au Québec sont sortis. Qu’est-ce qui vous a éventuellement surpris ?
Il est difficile de dire si nous avons été surpris. L’objectif de l’étude était en premier lieu de familiariser les participants avec les critères qui favorisent l’éclosion d’une culture de Créativité et d’Innovation au sein de la fonction RH.
Comprendre que le premier pilier, c'est-à-dire les individus, repose sur trois caractéristiques essentielles à savoir : le leadership créatif, la gestion mobilisante et l’esprit entrepreneurial. Comprendre que certaines valeurs telles que la passion et la confiance sont indissociables de l’innovation.
Enfin que l’Écosystème est clé et qu’il repose sur une stratégie et un modèle d’affaire qui recherchent l’innovation, des processus de gestion flexibles, des communications fluides et des ressources (moyens). Les résultats de l’étude nous ont surtout permis de constater que la Créativité et l’Innovation n’étaient pas encore un sujet d’étude et de préoccupation au sein de la fonction RH. Ils ne se sentaient pas encore investis d’une mission d’innover ni d’être le fer de lance de l’innovation au sein de leur entreprise. Peut être notre plus grande surprise : la difficulté à prendre des risques et à sortir de sa zone de confort. Encore beaucoup de gens de RH sont pris entre les griffes de leurs programmes de gestion qui sont devenus dans certains cas de vraies usines à gaz. Remettre en question le statu quo, challenger la nécessité d’avoir un système de gestion de la performance orienté vers des objectifs que personne n’est capable de clairement définir étant donné la rapidité des changements, réorienter le débat de la gestion de la performance vers celui de la gestion du développement, redéfinir la notion de talent et de haut potentiel, repenser la structure hiérarchique et les processus pour les rendre plus « agiles », revoir les profils des leaders en fonction de la nécessité de réinventer l’entreprise. Toutes ces questions peuvent être à l’origine de débats importants qui nécessitent forcément que la fonction RH prenne le risque de se réinventer. Le deuxième point qui nous a le plus surpris est le manque d’ouverture de la fonction RH par rapport au reste du monde. Peu de gestionnaires prennent le temps de réseauter pour aller au-delà de leur environnement immédiat. De même, nous allons parlons de plus en plus d’innovation ouverte et pourtant peu nombreux sont les gestionnaires RH qui impliquent leurs clients internes dès le début dans l’élaboration d’un nouveau programme RH. Mais là encore, nous sommes au début de la transformation de la fonction. Après avoir revendiqué le statut de « partenaire d’affaires », la fonction RH va maintenant devoir s’attaquer à celui de « conseiller stratégique » en amenant l’entreprise à un autre niveau, notamment vers une culture de créativité et d’innovation.
Vous m’avez mentionné vouloir continuer et pousser plus loin dans les études. Quelles seront les prochaines étapes ou projet ?
Aujourd’hui nous souhaitons pousser cette étude plus loin, d’une part pour avoir un échantillon toujours plus large et d’autre part afin d’intégrer la perception que les jeunes professionnels ont de la fonction RH. Quelle est leur perception par rapport à celle de leurs gestionnaires ? En combinant la perception des gestionnaires et de la Génération Y, nous devrions être capables d’avoir un meilleur aperçu de la situation actuelle. D’autre part, ces résultats pourront aussi être analysés à la lueur d’une autre étude que nous avons menée sur les attentes des jeunes finissants en RH et RT de trois différentes universités à Montréal. Les valeurs organisationnelles recherchées par les Milleniums lors de l’évaluation d’une offre d’emploi sont le respect (97%), la transparence (87%) et l’Innovation (77%). Enfin, nous envisageons aussi d’intégrer dans notre étude un échantillon de gestionnaires qui font partie des autres fonctions de l’organisation afin de sonder leur perception de la fonction RH.
Aujourd’hui, les RH sont-elles assez innovantes à votre avis ?
Non, je ne crois pas que la fonction RH soit suffisamment innovation aujourd’hui. Peu de temps est réellement consacré à la réflexion sur des sujets ardus et trop souvent on préfère appliquer des recettes déjà bien établies. Malheureusement, une telle approche qui était performante dans les années 90 et 2000 ne l’est plus aujourd’hui car le monde est devenu global, plus compétitif et instable. La fonction RH va devoir inventer de nouvelles stratégies qu’elle pourra breveter et protéger afin de se distinguer des autres compagnies et d’attirer, mobiliser et retenir les talents les plus innovateurs. Nous avons dépassé le stade des « employés du savoir » pour rentrer dans celui des « employés créateurs ». Nos systèmes de gestion, nos processus, notre culture organisationnelle, notre style de leadership, nos communications doivent accepter et embrasser les changements.
Comment voyez-vous l’évolution des RH à court et moyen terme ?
Sans être des « futuristes », nous percevons une évolution de la fonction RH vers 3 fonctions majeures : une fonction « opération RH », une fonction « culture » et une fonction « talent ». Et pourquoi pas un éclatement similaire à celui de la fonction commerciale entre les postes de vente et ceux de Marketing ?
N'hésitez pas à communiquer avec Philippe ou Julie pour vous joindre à leur panels !
Ils donneront également une conférence "Comment coacher vos gestionnaires pour optimiser l’expérience candidat ?" au RDV des recruteurs le 9 avril. Je vous invite à voir leur vidéo sur les tendances à surveiller en recrutement en 2015.
Enfin, pour ceux d'entre vous qui sont membres de l'ordre des CRHA, Philippe présente sa candidature à l'élection du CA. Sans aucun parti pris, j'avoue être ravie d'avoir un fier représentant du recrutement et de l'innovation en nomination ;)
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