Diversité et Inclusion, on le dit, mais on ne le fait pas…

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On en parle partout. 
On le sait. 
C’est prouvé.

Avec des équipes diversifiées :
On est une meilleure organisation,
On est plus intelligent.e.s collectivement,
Plus créatif.ve.s,
Plus performant.e.s,
Et avec un meilleur climat de travail.

On a voulu aborder le sujet de l’EDI (Équité, Diversité & Inclusion) au trumontreal cette année, sous un angle un peu différent. Hélène Priam-Legallais, avec toute sa sagesse, bienveillance et expérience, a accepté de prendre le rôle délicat d’animer ces échanges, qui auraient pu facilement déraper. Ils ont été parfois sensibles, il y a eu des propos pas toujours faciles à entendre. Mais visiblement, il était nécessaire d’en parler :

"EDI, on le dit, mais on ne le fait pas…"

J’ai revu Hélène par la suite. J’avais envie de faire le point avec elle, et de revenir sur certains aspects mentionnés et points évoqués. 

Je précise tout de suite, on a trouvé difficile de coucher par écrit ce que l’on s’est dit. On le sait, on peut facilement déraper. Nous avons tous.tes un niveau différent de communication qui peut amener un différent niveau d’interprétation. Je vais donc me permettre d’insister sur notre intention, pour qu’elle soit bien claire : notre intention est de soulever ces sujets, pour justement faire qu’un jour on n’ait plus besoin d’en parler. Nous souhaitons que la diversité et l’inclusion soient automatiques dans tous nos réflexes, et que nous ne regardions plus nos différences comme des entraves, mais bien comme des atouts. Je sais, c’est très utopique. Mais comprenez bien que c’est la finalité ultime. 

J’ai donc posé des questions parfois dérangeantes à Hélène, parce que ce sont des remarques que l’on entend régulièrement. Comprenez bien qu’elles n’illustrent en rien notre pensée. 

Hélène, est-ce que je peux te demander quelle a été ta première impression après ton animation à trumontreal ? Ton constat ?

Ma première impression est qu’il y avait un vif d’intérêt pour le sujet de l’ÉDI. Cet espace de discussion était comme une sorte de soupape qui a permis aux participant.es de ventiler, de partager sur un sujet parfois sensible.
C’était également une occasion d’échanger leur réalité.
Mon constat est que tout le monde n’est pas à la même place. Pendant que certains ou certaines sont bien avancé.es (sondage, auto-identification, obligation de représentativité dans le comité de sélection, d'au moins 1 ou 2 candidat.e.s des groupes sous représentés), d’autres expriment un véritable découragement, voire parlent de véritable charge mentale du recruteur.
Une participante m’a partagé que cet espace d’échange lui a permis de mettre en lumière la réalité terrain avec des employeurs positionnés en 3 groupes : 
•    A : ceux qui ont une culture qui semble permettre une "représentativité et inclusion naturelles"
•    B : ceux qui se "disent" ouverts ("chez moi, c'est l'ONU") 
•    C : ceux qui ne sont absolument pas ouverts

Une autre participante a partagé au groupe la réalité de son organisation dans "laquelle l'enjeu EDI semble axé sur les femmes en particulier et comment l'utilisation du pronom "Elle / She" peut constituer un symbole déclencheur de discussions"

Il est également ressorti le besoin d’être mieux formé.e, et sensibilisé.e sur le sujet de l’ÉDI notamment grâce à accompagnement aux discussions difficiles pour les équipes acquisition de talent. 
Ce fut un espace propice pour amorcer des discussions délicates vers des pistes de solutions. 

Pourquoi on s’engage en EDI aujourd’hui ?

C’est une bonne question. Quelle est en effet la véritable motivation des entreprises à s’engager en EDI ? Pour combler des quotas ? Par suite d’une plainte interne ? Pour renforcer leur marque employeur ?

On en voit qui s’engage pour des causes, des vraies causes : des dirigeants déjà sensibilisé.e parce qu'ils ont des personnes en situation de handicap dans leur entourage, d’autres qui le sont à l’immigration. Mais on en voit beaucoup qui le font pour combler les quotas. 
Ce qui important pour avoir un programme qui soit pérenne, c’est de faire des choix conscients et amener des décisions conscientes

Quel est le rôle du recruteur / spécialiste acquisition de talent en EDI ? 

Ce n’est pas toujours un siège facile, souvent pris entre les deux quand il s’agit de question de diversité. Les recruteurs entendent parfois des choses pas très faciles à accepter, et doivent composer avec ça. On a des gestionnaires ou des employé.es qui peuvent être fermé.es, ou avoir des propos déplacés (type micro-agressions). Pris au dépourvu, manque d’expérience, de recul, cela peut générer un malaise au point de ne pas savoir quoi répondre. 

Je comprends. Je l’ai souvent entendu dans mon premier emploi ici en agence de placement. Des commentaires de clients du genre "tu ne peux pas me trouver des noms plus faciles à prononcer dans les CV que tu m’envoies". Et j’avoue, que dans le contexte d’un premier emploi, avec un manque de maturité et de recul, je ne savais pas quoi répondre. Alors je leur répondais timidement en riant nerveusement "faites attention à ce que vous dîtes, je suis moi-même immigrante". C’était il y a plus de 25 ans, mais je suis sûre que ce genre de remarque doit encore se faire. 

À ton avis, qui place-t-on dans un rôle de responsable en EDI ? J’ai une question très sensible, par rapport au message qui est lancé lorsqu’on recrute pour ce poste. En tant qu’entreprise, si je place quelqu’un issu de la diversité, c’est comme si je venais avec mes gros sabots et que je disais : "vous voyez, chez nous on est diversifié". Mais d’un autre côté, si je ne le fais pas, j’ai aussi l’impression d’envoyer le mauvais message. On a tellement peur de mal faire, que quoi qu’on fasse, on a l’impression qu’on sera mal perçu. Tu en penses quoi ?

Réussir L’ÉDI, c’est développer la diversité qui reste un fait, mais c’est également (ou surtout) réussir l’inclusion. Moi, je souhaite travailler de concert avec tout le monde, tout en incluant autant les personnes représentatives des groupes minoritaires que les personnes représentatives des groupes majoritaires.
Veut-veut pas, les personnes issues la diversité visible sont des bons porte-paroles du sujet, de par leur histoire ou de leur expérience. Mais n’oublions pas l’importance de la place des minorités non visibles qui le sont aussi. Faire de l’ÉDI est un travail en continu et collectif, qui vise à faire un effort conscient pour s'assurer que tout le monde, notamment les groupes sous représentés, aient les mêmes chances d'accès aux ressources, aux emplois, aux promotions… 

Autre point délicat : j’entends aussi des gestionnaires / dirigeants qui ont peur de prendre des engagements avec des personnes de minorité visible de peur que ça ne marche pas et que ça se retourne contre eux dans le cas d’un congédiement. Que fait-on ?

Il est intéressant de questionner ce qui se cache derrière cette "peur" et d’évoluer en s’interrogeant sur la richesse et le potentiel qui se cache derrière "la bonne personne"
On revient sur la compétence. Elle est essentielle. 
Les seuls éléments à prendre en compte, dans tout le processus de recrutement ne devraient donc être liés qu’à ses compétences en lien avec le poste.
Il faut prendre du recul, sinon ça dessert la cause. C’est sûr qu’en cas de micro-agressions, de harcèlement, de la récurrence dans les remarques, on doit agir et vite. Sinon, il faut de la matière, un historique, et revenir sur quoi on base nos jugements et nos fondements, qui doivent être tangibles.

J’insiste donc : la compétence est essentielle !

Comment on démarre un programme d’EDI en entreprise ? Comment est-ce qu’on s’y prend ? Par quoi on commence ?

On commence par faire un diagnostic ÉDI de l'entreprise via des sondages ou une collecte de données pour avoir un état des lieux et révéler les enjeux saillants de l’ÉDI.
Il est important d’impliquer la haute direction dès le début du processus pour donner des orientations et un alignement clairs de la culture organisationnelle et des objectifs visés.
Par la suite, découlera un plan d’action qui permettra de définir les orientations et les parties prenantes et allié.es de ce changement.

Former les acteurs clés du recrutement, les sensibiliser à la notion de biais cognitifs est une nécessité 

Il sera alors temps de mettre en place des pratiques EDI afin de privilégier des offres d'emploi diversifiées et inclusives pour encourager les personnes issues des groupes marginalisés à postuler.
Il sera important de créer également des occasions de favoriser le dialogue l’écoute en mettant en place des activités inclusives pour renforcer les échanges et la découverte des autres cultures.

Se lancer dans l'EDI est un processus en continu qui demande du courage, de l’humilité, de la curiosité et de l’ouverture aux autres avec la volonté de s’impliquer pour changer les choses et favoriser des prises de conscience fortes. 

+++ Quelques lectures si vous souhaitez poursuivre les réflexions:

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